Les vêtements mono-matières sont la clef d’un recyclage efficace
Rédigé par Renaud Petit
Le 26 avr. 2021
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La prise en compte de la fin de vie du vêtement fait partie intégrante d’une approche plus responsable de la mode. Qu’arrive-t-il une fois que le vêtement a été consommé et n’a plus d’utilité pour celui ou celle qui le possède et qu’il ne peut être porté à nouveau par un·e adepte de la seconde main ? Dans l’idéal, il est déposé dans un centre de tri pour être recyclé et servir à la conception d’une nouvelle pièce. Toutefois, pour que cette épopée puisse se réaliser, il est une règle primordiale à respecter : le vêtement doit-être mono-matière. On s’explique.
Recyclage industriel des vêtements : les limites de la technologie
En théorie – Dans un monde écologique
Pour que la matière d’un vêtement usagé puisse servir à la fabrication d’une nouvelle pièce, elle doit être défibrée, c’est-à-dire extraite et refilée pour donner une nouvelle bobine. Le fil obtenu pourra ensuite être tissé à nouveau et être utilisé pour concevoir un nouveau produit. La boucle est bouclée.
En pratique – La transition énergétique
Le procédé industriel paraît simple mais il implique malheureusement une contrainte de taille : il ne permet pas de séparer des fibres différentes lorsqu’elles sont mélangées dans un seul et même produit.
En pratique, un pull composé de laine et de polyester mélangés ne pourra pas être recyclé selon ce procédé industriel pour donner d’un côté une nouvelle bobine de laine, et de l’autre une nouvelle bobine de polyester. Pour être recyclé en nouveau produit, un pull doit donc être composé d’une seule matière, par exemple 100 % laine.
Un vêtement à priori plutôt responsable, composé par exemple d’un mélange de coton et de polyester recyclé ou de coton et de lin, aura malheureusement peu de chance d’être réutilisé pour la confection d’une nouvelle pièce.
De la même manière, comme une chaussure, un vêtement composé de multiples garnitures rivets, zips, boutons… nécessitera des étapes de démantèlement, consommatrices de temps et d’énergie qui complexifient la procédure de recyclage.
Enfin, les apprêts ou finishing, c’est à dire les étapes qui donnent au vêtement certaines caractéristiques techniques ou esthétiques (imperméabilité, aspect mat, brillant, texturé) particulièrement dans l’outdoor, sont très difficiles à dissocier des tissus une fois appliqués.
Les procédés industriels de tri par matières et couleurs, de démantèlement, de défibrage sont en cours de structuration. Comme les citoyen·nes, les entreprises sont en transition et financent / testent et développent actuellement ces technologies, encore non efficientes à ce jour.
En attendant l’innovation, lisons les étiquettes
L’importance de privilégier les tissus composés d’une seule matière est également soulignée par L’Institut National de l’Economie Circulaire qui fait figurer cette notion dans ses conseils d’éco-conception :
“Le choix du tissu, des accessoires (boutons, rivets…) et des motifs ont des conséquences sur la fin de vie du produit (désassemblage et recyclage). Un jean ne peut être recyclé qu’à 30 % en raison des nombreux points durs (coutures) et des accessoires en métal. /…/ Privilégier les tissus mono-matière facilite le recyclage.”
Il est donc essentiel de lire attentivement les étiquettes de composition. Celles-ci sont d’ailleurs à conserver puisqu’elles seront également utiles au centre de tri qui doit pouvoir identifier clairement la composition du vêtement pour pouvoir en extraire la matière et envisager une revalorisation. Sans étiquette, le seul moyen de savoir ce que contient le vêtement est d’effectuer un prélèvement et d’analyser les fibres. Une solution extrêmement chronophage et coûteuse qui n’est, bien sûr, pas applicable à grande échelle.
Que faire de ses vêtements usagés conçus en matières mixtes ?
On parle de recyclage en boucle fermée lorsqu’un objet usagé est recyclé pour créer un nouveau produit de même nature. Il s’agit, par exemple, de réutiliser la laine d’un vêtement pour créer un nouveau manteau comme le fait Manteco, ou d’utiliser le PET d’une bouteille vide pour fabriquer une nouvelle bouteille.
Cependant, l’existence du recyclage en boucle fermée implique l’existence d’un recyclage en boucle ouverte, c’est-à-dire une forme de recyclage où un produit usagé est utilisé pour en créer un nouveau de nature totalement différente.
Tout n’est pas perdu
Nos vêtements bi-matières usagés ne sont pas forcément destinés à la décharge. Le recyclage des textiles en boucle ouverte est possible et permet à davantage de pièces d’intégrer une économie circulaire et vertueuse.
Si le mélange de matière le permet, le centre de recyclage peut revaloriser certains vêtements bi-matières :
- Les tissus où le coton est majoritaire peuvent être découpés et revalorisés sous forme de chiffon à l’échelle industrielle. Ce type de recyclage peut aussi être réalisé seul·e à la maison sans passer par la case usine (une fois le chiffon usagé, il pourra être déposé en centre de tri).
- Certains tissus en fibres mélangées peuvent être réutilisés dans la construction de bâtiments sous la forme d’isolants thermiques ou phoniques.
- Le matériau obtenu peut aussi servir à garnir l’intérieur des voitures voire réintégrer nos intérieurs, en rembourrage de canapés ou de coussins.
- En dernier recours, les tissus mélangés peuvent également être broyés et utilisés comme combustible industriel, en remplacement d’autres sources d’énergies comme le gaz.
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