Prix Earthshot 2023 : 2 startups pour transformer la mode éco-responsable

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Le Prix Earthshot, initié par le Prince William, récompense des solutions environnementales novatrices et scalables Chaque année, 5 startups reçoivent ainsi plus d’un million de livres pour déployer leurs solutions. En 2023, pour la première fois, deux entreprises liées à l’industrie de la mode figurent parmi les 15 finalistes du concours. Un beau signe de reconnaissance, mais surtout une occasion de voir émerger plus rapidement que prévu deux solutions industrielles innovantes. Présentation de ces 2 startups à suivre et qui pourraient peut-être, dans quelques mois, changer le visage de l’industrie.

Les deux entreprises répondent à des problèmes brûlants pour la mode : d’un côté, la pollution et l’utilisation massive d’eau causée par la production de teinture, et de l’autre l’impossible équation de recyclage des textiles.

Colorifix : le potentiel futur de la teinture non polluante

Nous sommes la première entreprise à proposer un processus entièrement biologique pour produire, déposer et fixer des pigments sur les textiles, inspiré par la façon dont les couleurs sont produites dans la nature et conçu grâce à la biologie synthétique“. Voici comment le CEO Orr Yarkoni présente Colorifix.
Cette startup britannique entend répondre à la pollution et au gaspillage massif d’eau entraîné par la seule production de teinture pour les textiles. 
Fondée en 2015, Colorifix se donne pour objectif principal de révolutionner l’industrie de la teinture en développant des solutions de teinture plus durables, écologiques et éthiques. La solution de Colorifix s’appuie sur l’utilisation des micro-organismes pour produire des colorants naturels et durables. Contrairement aux méthodes de teinture traditionnelles, cette approche permet de réduire considérablement la liste d’ingrédients nécessaires, la consommation d’eau et de produits chimiques toxiques, tout en minimisant les déchets et les impacts environnementaux. Les fondateurs de l’entreprise l’assurent : ces teintures ne coutent pas plus chères que les teintures conventionnelles. 

Le séquençage de l’ADN pour créer des colorants durables 

Colorifix crée des colorants naturels à partir d’organismes génétiquement modifiés. La startup touche aux codes génétiques des couleurs présentes dans la nature et enseigne à des micro-organismes comment les reproduire. Le processus commence par l’identification d’une couleur créée naturellement par un animal, une plante ou un micro-organisme. Le séquençage de l’ADN vient ensuite déterminer à quel endroit cette couleur est codée dans la génétique de l’organisme étudié. Le code génétique de l’ADN est ensuite traduit dans les micro-organismes génétiquement modifiés de Colorifix, ce qui leur permet de produire le pigment – exactement comme il est produit dans la nature – et de le transférer sur le tissu. Les colorants naturels ainsi produits réduisent la pollution chimique de 80 %. Ils nécessitent également moins de rinçages que les colorants synthétiques.
Grâce à ce possible coup de pouce du Prix Eartshot, et d’autres levées de fonds à venir, Colorifix ambitionne de teindre 15 % des vêtements du monde d’ici 2030. La startup devrait ainsi attirer l’attention des grandes marques qui, si elles faisaient appel à cette solution, pourrait faire un gros bond en avant dans des objectifs de durabilité et de transition écologique qui, le plus souvent, traînent et peinent à être atteint.

Jim et Orr, co-fondateurs de Colorifix. Crédit : Colorifix

Colorifix commence déjà à séduire des clients d’envergure. Des marques dont les volumes de production sont tels qu’un changement vers des teintures plus propres peut avoir un impact significatif sur le secteur tout entier. “En avril 2021, H&M a lancé des produits teints avec notre technologie, suivis par Pangaia avec une collection capsule la même année. Nous prévoyons de collaborer étroitement avec d’autres grandes marques internationales pour transformer l’industrie.” explique Orr Yarkoni.

Circ.inc : recycler les fibres textiles usagées en nouvelles fibres 

Cette startup américaine propose une solution innovante pour surmonter l’un des principaux obstacles à l’établissement d’une mode véritablement circulaire : le recyclage des tissus en polycoton (mélange de polyester et de coton). Ces tissus, qui représentent plus de 50 % des déchets textiles, sont notoirement difficiles à recycler puisqu’ils nécessitent une séparation laborieuse, trop coûteuse et techniquement difficile des fibres avant de les recycler. En conséquence, moins de 1 % des déchets textiles sont actuellement recyclés pour fabriquer de nouveaux vêtements. En 2021, seuls 8,9 % des fibres sur le marché étaient recyclées. Tous les vêtements en polycoton collectés subissent généralement une forme de “down-cyclage”, une transformation en matériaux non textiles  : isolant pour les bâtiments, rembourrage pour les meubles ou l’industrie automobile, chiffons de nettoyage, mais aussi combustibles, ce qui libère des produits chimiques toxiques lors de la combustion.
Si les polycotons pouvaient être recyclés efficacement, cela pourrait considérablement augmenter la quantité de vêtements recyclés en nouveaux vêtements, réduire la production de coton et de polyester neufs, et favoriser la concurrence entre les matériaux vierges et recyclés.

Un procédé chimique innovant qui parvient à séparer les fibres sans efforts et sans solvants polluants 

Circ Inc. a donc développé une méthode potentiellement révolutionnaire pour le recyclage des polycotons : les fibres sont séparées grâce à son processus hydrothermal, qui transforme les fibres de polyester en un polymère liquide.  Le procédé préserve le coton et rend possible la réutilisation des fibres dans la production de nouveaux textiles. Le processus permet de récupérer environ 90 % du coton et du polyester, selon Peter Majeranowski, le président de Circ. Inc.
L’entreprise, qui détient un brevet pour son procédé, a levé près de 24 millions d’euros lors de sa dernière levée de fonds en 2023. Cependant, elle doit encore s’étendre pour résoudre les problèmes de l’industrie de la mode, ne serait-ce que sur son seul marché américain. Les usines pilotes actuelles ne sont en mesure de traiter que 5 tonnes de déchets textiles par jour.  par rapport au 11,3 millions de tonnes de textiles qui finissent chaque année à la poubelles aux États-Unis. L’entreprise vise l’ouverture d’une première grande installation aux alentours de 2025. Cette nouvelle usine pourrait traiter jusqu’à 200 tonnes de déchets par jour, soit environ 65 000 tonnes annuellement.

Peter Majeranowski, CEO de Circ
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