Impact des teintures naturelles VS teintures chimiques
Rédigé par Marion Jourdan
Le 28 févr. 2022
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Trouver un vêtement avec une teinture naturelle ? Accrochez-vous ! Dans l’histoire du vêtement, les teintures naturelles étaient la seule option avant l’apparition des couleurs de synthèse, au milieu du 19ème siècle. Depuis, les colorants artificiels, les poudres métalliques et les teintes fluos déferlent, offrant une palette de couleurs plus fournie aux créateurs. Les procédés de teinture requièrent de grandes quantités d’eau et l’usage de substances chimiques toxiques pour l’homme et l’environnement… Nous avons étudié l’impact des teintures chimiques et leurs alternatives écologiques, puis sélectionné quelques marques qui les travaillent.
© Dries Van Noten
L’impact environnemental des teintures chimiques vs naturelles
Qu’est-ce qu’une teinture chimique ?
On définit par teinture chimique, un procédé de teinture ayant recours à des colorants à base de pétrole, de métaux lourds, de colorants azoïques, de formaldéhyde et de chlore. Ces composants sont reconnus comme étant très nocifs pour la santé.
La teinture est une étape qui nécessite beaucoup d’eau. Dans certains pays, notamment le Bangladesh, la Chine, l’Inde, les rejets néfastes pour l’environnement sont autorisés, de ce fait il y a très peu de traitement des eaux usées.
C’est un fait, les rejets des usines de teintures sont classés parmi les sources de pollution les plus dangereuses. [1]
Pourquoi on les utilise ?
Pour qu’un vêtement ne se délave pas, le colorant doit résister aux lessives à répétition, à la lumière, aux agents (réducteurs, oxydants, acides)… Après la phase de teinture, la dégradation du colorant est complexe. Il persiste dans les eaux usées qui a un impact à court et long terme sur l’environnement :
- À court-terme, la dégradation des colorants riches en nitrates et phosphates causent une eutrophisation des milieux aquatiques ou la déperdition en oxygène, responsables de l’asphyxie des animaux et végétaux ;
- À long terme, ces substances s’accumulent dans les organismes vivants que l’on ingère et sont potentiellement cancérigènes. Nous n’avons cependant pas trouvé de données précises à ce sujet dans la littérature scientifique.
Vous l’aurez compris, la seule piscine rose que l’on devrait tolérer c’est une piscine de rosée !
© Newscom
Les teintures naturelles
Peaux de fruits ou légumes, plantes fraîches ou séchées, on retrouve des pigments un peu partout.
Teindre naturellement c’est un peu comme faire sa popotte : on commence par faire bouillir de l’eau avec une pincée de sel, on fait macérer les tanins, tout en assaisonnant de pigments avec précision.
Alors… Pourquoi n’en met-on par partout ?! Parce que les teintures sont moins résistantes que les teintures artificielles et leurs usage quotidien à dose “industrielle” (notamment pour fabriquer des vêtements) n’est pas assez développé à l’heure actuelle. On attend ces solutions avec impatience, on fait le guet.
© Kaliko
Quel est l’impact des teintures chimiques sur la santé ?
En Europe, la norme EN 14362 établit une liste des colorants azoïques (contenant de l’azote et des dérivés potentiellement toxiques) interdits d’utilisation. Le problème est que ces produits non-conformes sont retrouvés dans les prélèvements des eaux des principaux pays fabricants… Et que l’Europe externalise la grande majorité de sa production vestimentaire. Parmi les concernés, quelques pays seulement fabriquent les colorants dont le Bangladesh, la Chine, l’Inde… Ils ne sont pas soumis aux mêmes réglementations.
Par ailleurs, ils ne sont pas non plus tenus de protéger efficacement les travailleur•ses exposés à la toxicité des gazs et substances au contact de la peau ou inhalés (pas de masques, hotte, tabliers, gants, pas de suivi en médecine du travail… etc).
Le vêtement qui nous sert de seconde peau lèse aussi celle des ouvrier·e·s qui le conçoive.
Un Pantone des marques aux teintures naturelles
Fidèle à notre Good Good mood, on vous propose de terminer sur une note enthousiaste ! Voici une sélection de marques engagées pour des teintures propres.
Trois options au choix :
- Le “no-dye” qui consiste à utiliser la fibre dans son coloris naturel (Le Ludo chez Le Slip Français, les laines Le Modeste) ;
- Le “plant-dye”, qui a recours aux plantes comme l’indigo naturel, chez Industrie of All Nations ;
- Les “teintures naturelles”, à base de plantes ou de déchets alimentaires comme l’avocat chez Simplement Lingerie, les écorces de bois, les insectes etc.
© Simplement
À vos marques !
Noyoco
Noyoco est une marque de mode parisienne éco-responsable pour les hommes et les femmes. Essentiellement faite à partir de stock de Maison de couture, les pièces sont toutes fabriquées en Europe. Les collections capsules lancées chaque mois sont un moyen pour la marque de sortir de la temporalité des collections Automne/Hiver et Printemps/Eté. Noyoco privilégie les couleurs naturelles et offre une palette de tons pastels. Motifs et imprimés sont limités.
Kow Tow Clothing
Kow Tow Clothing tire son origine du chinois « Kau Tau », geste de respect envers une personne. Originaire de Nouvelle-Zélande, cette marque fait preuve de transparence :
- Fibres dégradables et recyclables
- Fabrication en Inde
- Teinture bannissant les substances dangereuses certifiées GOTS
- Laine mérinos ayant le label BlueSign
Les gammes colorées sont déclinées au fil des saisons oscillant entre teinte froide et chaude, motifs et imprimés variés.
Icicle
Icicle, originaire de Shanghaï, veut créer des vêtements que l’on aimera longtemps. La marque travaille depuis plus de 20 ans des pièces de luxe durable, le no dye et teintures végétales sur matières naturelles (lin, laine, soie). Des pigments issus de graines de pavots, thé blanc, peaux avec de la laine, du cachemire, de la soie pour toile de fond.
On ne vous le cache pas, il n’y a pas une recette colorée magique. Toxicité, consommation d’eau, difficulté de fixation de la couleur, les challenges futurs pour la teinture sont nombreux à relever !
Et si vous avez envie de jouer à l’apprenti teinturier
Whole Studio , studio de création et production textile, propose des workshops d’initiation de teinture végétale à Paris, au 86 rue Jean Pierre Timbaud, dans le 11ème arrondissement.
On en sort instruit et avec un carnet illustré d’échantillons, un échantillon avec la technique du shibori, et une pièce teinte par nos soins !
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