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#SmartInfluence Paolo Luka-Noé, penseur et influenceur engagé

L'esthético-philo

#SmartInfluence est une série d’interview-portraits dédiée à la nouvelle génération de personnalités d’influence. Des femmes et des hommes aux engagements variés tels que l’écologie, la condition féminine, la voix de minorités, la revendication d’égalités sociales. Nous avons eu la chance de faire de Paolo Luka-Noé, penseur & influenceur, notre troisième invité.

Lire les interviews d’Aurane K, Girl Go Green et Iznowgood.

 

Paolo perçu par The Good Goods (et pourquoi on l’adore)

Après avoir connu la renommée et pris conscience de son pouvoir d’influence, Paolo opte aujourd’hui pour un dépouillement matériel et un enrichissement personnel. En électron libre, il suit un parcours atypique au gré de ses questionnements et de ses envies, vagabond du 21ème siècle, ivre de liberté dont l’éveil et le savoir sont le socle.
Paolo est un touche-à-tout. Du chant au théâtre, du podcast à la guitare, son but est triple : apprendre, s’exprimer et échanger. Cet épicurien à l’âme d’enfant évoque avec humilité et humour ses doutes et ses dissonances cognitives, entre rêve de frugalité et société d’hyperconsommation. Dans cet entretien, il lève le voile sur les coulisses d’une vie d’influenceur et nous parle de ses questionnements politiques, écologiques et sociétaux. Derrière l’image vitrine d’Instagram se trouve une personne authentique. Rencontre avec un citoyen du monde engagé, à ne pas réduire à son sourire charmeur. 

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L’interview de Paolo Luka-Noé 

Qui es-tu, Paolo ?

Je suis un ex-étudiant. J’ai mis en pause ma vie étudiante depuis le confinement alors que j’étudiais la philo, après trois ans d’histoire de l’art et de cinéma, dont une année à Madrid.
Depuis 2 ans, je reprends des cours de théâtre de manière assidue. J’ai joué dans deux courts métrages et il y en a un long en préparation. En parallèle, j’anime un compte Instagram qui me permet de rencontrer des gens et de travailler avec des marques éco-responsables. Depuis un an je suis mon propre patron. J’ai des projets personnels : une entreprise qui va dans le sens de l’éco-responsabilité, ma carrière d’acteur et un podcast.

D’où vient cette communauté Instagram ? 

Ma communauté Instagram s’est construite de manière organique, j’étais lycéen. Sur l’île de la Réunion, un photographe m’a pris en photo, j’avais alors 200 abonné·e·s, ce nombre a rapidement été multiplié par 10 puis 100. J’avais alors l’impression d’être dans un rôle, les filles gravitaient autour de moi. J’ai obtenu mon bac, continué les photos. La notion d’influence est arrivée comme ça, elle m’a apporté beaucoup de choses : des rencontres humaines, des opportunités professionnelles, de l’argent de poche. A l’époque, je n’avais pas une conscience de la corrélation entre cette activité et notre mode de vie basé sur l’hyperconsommation.

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À quel moment as-tu pris conscience de ton pouvoir d’influence, et quels sont aujourd’hui les messages que tu portes ?

C’était il y a trois/quatre ans, je n’étais pas très averti. J’avais de vagues notions sur la déforestation, je savais que notre mode consommation ne pouvait pas continuer de cette façon, linéaire.
J’ai conscience d’avoir encore un discours paradoxal, j’émets une critique acerbe de la société dans laquelle je vis, du néolibéralisme, de l’incarnation de l’envie. Pourtant c’est aussi ce qui à présent me fait vivre. Alors j’essaie à ma mesure de le faire le moins mal possible et de favoriser des messages et des entreprises responsables.
J’essaie de rendre beau le quotidien. J’ai une vie de vagabond qui aime rire, l’art dans les choses les plus simples où se trouve l’absolu. Sur Instagram, je poste et partage également des choses simples : des photos de friperies, d’exposition, de soirées avec des potes, de couchers de soleil sur les marches du Sacré Coeur, des selfies… J’évite la prétention par l’autodérision. La plupart du temps, ma communauté trouve ça cool, car nous avons le même mode de vie.

On vit pour le beau, l’amour, la musique, le rire, les films. Nous sommes des êtres esthétiques comme peut l’être la Nature.

Comment faire passer des messages profonds sur un canal comme Instagram, plutôt superficiel ?

Il me semble que la bêtise, comme le mal en ce monde, vient de la peur, elle-même sous-tendue par l’ignorance. La connaissance permet donc le bien. La problématique principale est celle du format qui nous restreint : j’ai fait des vidéos où je parlais d’anxiété, de la de viande, de pandémie, de surconsommation… Ce sont des moments d’échanges longs, je ne veux pas être approximatif. On est habitué·e·s au format bref de Konbini, vulgarisateur mais qui ne permet pas d’aller au fond des choses. Pour cette raison, le podcast est le canal qui me motive le plus, il permet de prendre le temps de complexifier une idée. J’ai envie d’inspirer les gens par un travail de conscientisation et de stimuler leur curiosité. C’est un gros défi que de développer une idée, divertir et informer. Mais tout le monde ne s’intéresse pas encore à ces sujets. J’avais 200 000 abonné·e·s et en un an, j’en ai perdu 50 000 progressivement du fait de ne pas poster tout le temps des photos et de partager des contenus sur l’écologie.

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Je suis un individu perdu et je partage mes idées, comme un enfant qui ferait “toc toc” à l’univers pour trouver des réponses. 

Comment organises-tu ta journée ?

Mon portable gouverne un peu ma vie. Je lis énormément ou j’écoute des conférences pendant le petit-déjeuner. J’essaye de me cultiver. Je passe au moins deux heures à regarder des vidéos de vulgarisation sur Youtube, j’ai l’impression que mon existence prend alors un sens et j’ai l’espoir que notre modèle, en fin de course, se transforme vers une nouvelle réalité. Un futur basé sur les groupes sociaux, l’entraide, la maîtrise des ressources, la fin des tensions internationales et des lobbies, de grandes industries, de grandes institutions comme le FMI. Cela peut paraître naïf mais ces perspectives sont un phare au quotidien.

Peux-tu nous raconter ton éveil écologique ? 

Mon éveil écologique s’est fait en plusieurs temps. Cela a commencé par Soleil Vert, une dystopie que j’ai vue à l’âge de 12 ans. Elle dresse le portrait d’une société soumise à la pénurie d’eau, séparant les très riches et les très pauvres. Les gens mangent des collations qui s’appellent Soleil Vert, (NDLR : attention, la suite de la phrase est un spoiler), il s’agit en réalité de carcasses humaines reconditionnées en rations de survie pour les “non élu·e·s”. Un autre film plus récent, du même type et que je peux recommander est Snowpiercer (Le Transperceneige en français), une autre dystopie dans laquelle la planète Terre est entrée dans une nouvelle ère glaciaire. Les Humains sont dans un train qui tourne autour de la Terre indéfiniment, seule source de chaleur, où les wagons sont organisés en fonction des classes sociales. Les privilégiés à l’avant, les parias et esclaves sont en bout de train, ils tentent une révolte.
À partir du lycée, j’ai pris la mesure de mon ignorance totale en matière d’écologie, j’ai réalisé que tout était intriqué. C’est à la Sorbonne, à la fac, que je me suis politisé. 

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Tu parlais de dissonance cognitive, aujourd’hui tu luttes contre le capitalisme traditionnel et vis à la fois des relations aux marques que tu soutiens. Comment cela s’organise ?  

J’ai un agent qui m’aide à démarcher des marques. Je n’ai pas envie d’influencer de manière hypocrite, j’ai refusé des marques qui n’envoient pas des messages en accord avec mes valeurs. Les petites marques n’ont pas beaucoup d’argent, parfois il est compliqué de faire la part des choses entre le respect de mon travail et l’envie de les aider.

Quelle est ta conception de la mode éthique ? 

J’ai beaucoup d’admiration pour ces marques, malheureusement je n’en ai pas encore trouvé qui me conviennent. Souvent, étant donné qu’on axe la production sur la durabilité, l’esthétique est en second plan. Les marques éthiques proposent des choses très lambda et la jeune génération ne s’habille pas de manière casual. Aujourd’hui, il y a une identité vestimentaire forte de la jeunesse. La mode éthique est encore un marché très niché avec un nombre de consommateur·ice·s restreint. Autre problématique, la plupart des produits écologiques sont aussi féminins.
Je me retrouve actuellement dans quelques marques comme Timberland, Ecoalf ou Patagonia. 

Qu’est-ce qui est difficile dans le quotidien d’un influenceur ?

Tu sais que tout ce que tu fais va être jugé.
On est drogué à nos portables, c’est notre objet de travail et ça n’est pas très sain. C’est à la fois une prison et une échappatoire. J’aimerais une semaine par mois réussir à désactiver Instagram.

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Comment définirais-tu ton style vestimentaire ?

Depuis un an je n’ai rien acheté. J’essaye de devenir minimaliste, c’est bien de pouvoir partager ce genre de tendances au lieu d’être dans l’accumulation. J’avais une cinquantaine de vestes et une trentaine de pantalons. Je me sens sincèrement plus libre en ayant 4 pantalons, 4 pulls, 3 t-shirts. Je pourrais faire des excès mais je veux pouvoir définir mon identité avec ¾ tenues. Le cargo c’est ma veste phare. Mes potes diront, “Paolo c’est, la bottine, le col roulé, une veste soit longue soit courte”. Je m’habille dans une tenue qui me permet de passer d’une soirée à une rando. J’ai un style urbain, bohème, baroudeur.

Quelles sont les personnalités, les comptes, les lectures qui t’inspirent ? 

Je suis influencé partout et tout le monde. Je fais confiance à mes intuitions, cela va de ce que j’observe dans la rue aux photos des réseaux sociaux, les films, les clips, les soirées.
Côté personnalités, Jim Carrey pour sa spiritualité, Leonardo Dicaprio pour son engagement écologique, Joaquin Phoenix pour ses convictions vegan et son rapport à la surconsommation, Coluche, Charlie Chaplin, Johnny Depp, Jane Fonda, Shia Labeouf, Kanye West, Harry Styles, au look dandy avec des touches féminines roses un peu candy.

Mes lectures quotidiennes :

  • Le monde diplomatique
  • Les articles du CNRS de philo
  • L’Encyclopedia Universalis

Les économistes et penseurs, sociologues de l’imaginaire 

  • Denis Robert  
  • Frédéric Lordon
  • Thomas Porcher
  • Idriss Aberkane, un mentor spirituel
  • Günter Pauli, auteur de l’économie bleue selon laquelle le déchet que tu produis est transformé d’une valeur ajoutée. 

Sur Youtube et Instagram

  • Aurélien Barreau, physicien vulgarisateur
  • Jean Marie Certovessi
  • Partager C’est Sympa
  • Eureka 
  • Thinkerview : politique, éco.. (un podcast également sur Youtube)
  • Camille Etienne
  • Nicolas Meyrieux 
  • Salomé Saqué 
  • Camille Etienne : activiste

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Informez-vous, politisez-vous.

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