Leader européen de la fourniture de produits en fibres naturelles pour l’industrie automobile, EcoTechnilin équipe les constructeurs en panneaux de porte, fonds de coffres, tablettes arrières, pavillons, passages de roues et tableaux de bord. Cette entreprise normande, qui a été fondée au début des années 2000 par une coopérative d’agriculteurs, a relancé, en 2022, la production industrielle de fil de lin sur le territoire français en proposant un modèle économique pertinent pour la réindustrialisation. Explications.
La Normandie est le premier producteur de lin au monde, avec 80 000 hectares cultivés entre l’Eure, la Seine-Maritime et le Calvados, qui fournissent en moyenne 115 000 tonnes de fibres tous les ans, dont la grande majorité est destinée à l’export. En effet, depuis 25 ans, les filatures tricolores ont peu à peu déménagé en Pologne, en Tunisie, en Chine ou au Bangladesh, à la recherche de coûts de main d’œuvre plus avantageux, ce qui a entraîné une perte de compétences dans le peignage, le tricotage, le tissage, la teinture, la confection. La mondialisation a fait disparaître un savoir-faire qui était solidement implanté au niveau régional. En fabriquant un fil français, EcoTechnilin entend inverser la tendance et reconstituer l’écosystème du lin pour proposer une production locale, peu impactante pour l’environnement et traçable de bout en bout du champ jusqu’au produit fini.
L’objectif est de prendre la matière première comme point d’entrée de la relocalisation. “Produire à nouveau du fil sur le territoire, cela veut dire faire appel aux autres métiers, teilleurs, peigneurs, teinturiers, tricoteurs, tisseurs, confectionneurs, ce qui permet de reconstituer l’écosystème.” Karim Behlouli, PDG d’EcoTechnilin.
La French Filature, un site pionnier pour réindustrialiser la mode
Opérationnelle depuis 3 ans, la French Filature est le bras armé de cette ambition. Située à Saint Martin du Tilleul en Normandie, dans les locaux d’EcoTechnilin, cette usine innovante est équipée de 18 machines pour le peignage, la préparation du ruban et la filature. Elle peut produire chaque année 250 tonnes de fil grâce à 35 collaborateur·ices passionné·es et investi·es dans le travail du lin, et vise une montée en puissance progressive afin d’arriver au même niveau que les grosses filatures européennes. “Produire à nouveau du fil sur le territoire, cela veut dire faire appel aux autres métiers, teilleurs, peigneurs, teinturiers, tricoteurs, tisseurs, confectionneurs, ce qui permet de reconstituer l’écosystème et de retrouver des compétences qui ont été perdues.” explique Karim Behlouli, PDG d’EcoTechnilin.
Contacter la French Filature par EcoTechnilin
À date, la French Filature a pour clients des enseignes comme Jules, La Redoute, Saint-James, Maison Lemahieu, Le jacquard français ainsi que des marques de Luxe et a lancé, il y a quelques mois, lindefrance.fr, sa propre marque à destination du grand public, qui propose, uniquement via un site marchand, des t-shirts, des casquettes, de la bagagerie, et bientôt des chemises et des chaussettes, ce qui lui permet de conforter son chiffre d’affaires.
“Nous choisissons des produits qui sont bons pour l’environnement (…). Rien qu’avec l’électricité décarbonée française, nous n’émettons que 56gCO2/kWh, ce qui est 16 fois moins impactant qu’en Chine.” Karim Behlouli, PDG d’EcoTechnilin.
Autre point fort de ce projet, l’usine tire pleinement partie des bénéfices écologiques de la relocalisation. “Nous choisissons des produits qui sont bons pour l’environnement alors qu’à l’autre bout du monde, les traitements consomment beaucoup plus de chimie, d’eau et d’énergie. Rien qu’avec l’électricité décarbonée française, nous n’émettons que 56gCO2/kWh, ce qui est 16 fois moins impactant qu’en Chine.” détaille Karim Behlouli.
Au total, cette solution permet de gagner 55% d’impact environnemental sur un produit comme le T-shirt et ces chiffres sont vérifiés grâce à la mise en place de l’outil de La Belle Empreinte cofinancé dans le cadre de l’appel à projet TEXHABI2 de L’ADEME. Cette baisse de l’impact environnemental est un atout pour permettre aux entreprises d’atteindre les objectifs climatiques de l’accord de Paris.
Inspirer et accompagner les industriels tricolores à coûts raisonnables
Pour contourner l’écueil des tarifs élevés du Made in France, principal frein à la réindustrialisation, la French Filature actionne deux leviers. D’une part, toutes les opérations pouvant être automatisées l’ont été, ce qui a permis de réduire les coûts de fonctionnement. Ensuite, la production du fil à la garde robe s’appuie sur un groupement de partenaires réunissant chaque spécialiste du lin, ce qui forme une chaîne de valeur à part entière. “Nous appliquons une politique de marges réduites pour rémunérer chaque maillon de façon juste. En procédant ainsi, nous pouvons faire l’ensemble des étapes en France avec un surcoût qui est très faible.” commente Karim Behlouli. Cela permet aussi aux partenaires d’être solidaires et donc plus résilients en temps de crise.
“Nous appliquons une politique de marges réduites pour rémunérer chaque maillon de façon juste. En procédant ainsi, nous pouvons faire l’ensemble des étapes en France avec un surcoût qui est très faible.” Karim Behlouli.
Autre modalité, pour les donneurs d’ordres qui souhaiteraient commencer à relocaliser une partie de la valeur ajouter, il est possible, à partir du fil Made in France, de faire le tissage et la confection dans un pays voisin, que ce soit le Portugal, la Grèce, ou la Pologne, ce qui n’augmente le prix que de quelques euros par produit. Ainsi, on laisse le choix à une marque du made in France à la carte, sur un ou plusieurs segments de la production, permettant d’entrer dans un processus de production local et vertueux en maîtrisant les coûts et d’effectuer une transition partielle ou progressive vers un raccourcissement des chaînes de valeurs.
Contacter la French Filature par EcoTechnilin
Avec la French Filature, Ecotechnilin démontre qu’un autre modèle industriel est possible, à la fois économiquement pertinent, décarboné, transparent et souverain. “La filature est le premier maillon. C’est le point d’entrée pour réindustrialiser la mode. Grâce à ce projet, nous voulons désormais accompagner les entreprises du secteur dans la relocalisation de tout ou partie de leurs activités” conclut Karim Behlouli.
