Référence mondiale de la mode et des matières premières depuis plus de 50 ans, le salon Première Vision revient au parc des expositions de Villepinte du 16 au 18 septembre. Pour cette nouvelle édition, l’événement opère un tournant stratégique en plaçant l’innovation et la tech au cœur de sa programmation, afin de décrypter les grandes mutations de la filière et outiller les professionnels face aux défis à venir.
Repenser le salon à l’heure des mutations technologiques
Après une édition consacrée aux savoir-faire en février dernier, Première Vision opère un changement de cap. En septembre, le salon investit à nouveau Paris Nord Villepinte pendant trois jours mais avec un nouveau mot d’ordre : innovation et tech. « Ce rendez-vous est pensé comme un véritable observatoire de ces thématiques », déclare Florence Rousson, présidente du directoire. Plus de 1 000 exposants sont attendus pour présenter les solutions de demain, dont 12 % de nouveaux participants.
« Les équipes de design ne viennent plus seules, elles sont désormais accompagnées des responsables production et RSE. » Florence Rousson
Cette nouvelle prise de position s’inscrit dans un contexte de bouleversements structurels. « Le marché n’est plus le même qu’en 2018-2019. Le sourcing, la consommation et la production se sont totalement réorganisés », analyse la présidente. Le salon entend jouer un rôle d’éclaireur, proposant aux marques et aux fabricants des lectures stratégiques prospectives et des leviers d’action. Cette transformation se reflète d’ailleurs dans le profil des visiteurs : « Les équipes de design ne viennent plus seules : elles sont désormais accompagnées des responsables production et RSE. Ce triptyque, essentiel, doit être pris en compte », observe-t-elle.
Pour répondre à l’ensemble de ces attentes, les espaces de contenu ont été repensés. En complément des stands, deux scènes de talks accueilleront experts, designers et industriels. L’une explorera les dynamiques de création et tendances ; l’autre sera entièrement consacrée aux mutations technologiques et innovatrices. Matériaux intelligents, intelligence artificielle, traçabilité, design virtuel, procédés à faible empreinte… Les grands enjeux seront abordés à travers conférences, pitchs et débats.
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Une envie d’innovation portée par la rentabilité, l’écologie et le sens
En matière d’innovation, les organisateurs observent déjà un basculement : celle-ci ne se limite plus à la seule recherche de technicité. « Il y a une véritable convergence entre performance, impact réduit et désir de sens », analyse Desolina Suter, directrice mode de Première Vision. Ces nouvelles exigences – relatives à la circularité, à la régénération des ressources ou encore à la sobriété énergétique… – se traduisent aujourd’hui par des solutions hybrides, alliant ingénierie et responsabilité environnementale. « On note notamment le développement de fibres biosourcées issues de résidus agricoles, le perfectionnement des matières recyclées ou encore l’essor de nouveaux procédés de finition à faible impact, comme les teintures sans eau ou par bactéries », poursuit-elle.
Or ces avancées trouvent au salon parisien un terrain d’expression privilégié : l’espace Smart Creation. Pensé comme un laboratoire de l’innovation, ce pôle – renforcé en 2025 – rassemble des exposants sélectionnés pour leurs propositions novatrices. Cette année, des matières issues de champignons (Mycoworks, Mycel), d’algues (Peelsphere), de fruits invendus (Ecolgreen Tec), de micro-organismes cultivés (Gozen) ou encore de fibres recyclées à haute traçabilité y côtoieront des procédés de coloration (Colorifix, Ever Dye, Anatolina Colors) et des fils protéiques de nouvelle génération (développés par Spiber, Amsilk ou Link Spider).
Pour guider les visiteurs dans cet écosystème dense, le salon propose également les Smart Keys, des parcours thématiques autour de la bio-ingénierie, de la circularité ou de la traçabilité. Enfin, un système de signalétique baptisé « Better Way » permet d’identifier en un coup d’œil les exposants les plus engagés. « La démarche se veut avant tout pédagogique et encourageante, sans notation ni classement », précise Julie Bianchi, responsable du développement international. Des audits aléatoires sont toutefois menés sur 10 % des entreprises référencées, afin de garantir la véracité des déclarations.
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Vers une industrie augmentée
« Les banques textiles virtuelles permettent un sourcing plus agile, plus durable, mieux aligné sur les nouveaux rythmes du marché. » Florence Rousson
À l’instar des matières, les outils de création et de production évoluent également. Parmi les avancées majeures, les banques textiles virtuelles – comme Twinbru ou Material Exchange – permettent de consulter en ligne des bibliothèques de tissus numérisés en haute définition, intégrables aux logiciels de design 3D. « Cela permet aux créateurs de sourcer plus rapidement, tout en réduisant les prototypes physiques. C’est un sourcing plus agile, plus durable, mieux aligné sur les nouveaux rythmes du marché », observe Julie Bianchi.
Cette digitalisation s’accompagne également d’une montée en puissance des outils de mesure d’impact, dans un contexte réglementaire en évolution – le coût environnemental doit entrer en vigueur en France d’ici à la fin 2025, sur la base du volontariat. Des acteurs comme La Belle Empreinte ou PefTrust aident ainsi les marques à anticiper ces exigences et à structurer leurs feuilles de route. Côté deadstock – ces stocks dormants de matières inutilisées –, la traçabilité progresse aussi grâce à des entreprises comme Maeba ou Fabric House, qui en assurent une gestion renouvelée, ouvrant la voie à un réemploi plus structuré.
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Une lecture élargie des tendances et des marchés
« Les frontières s’estompent entre mode, bien-être et expression de soi » Florence Rousson
En matière d’usages et d’imaginaires, Première Vision affine sa lecture des tendances. « Chaque saison, nous analysons les mutations des modes de vie, les signaux émergents pour en dégager des pistes créatives et stylistiques », résume Desolina Suter. En 2025, cette exploration s’étend à un nouveau territoire : la beauté, qui fait son entrée dans l’Espace Prospectif. « Les frontières s’estompent entre mode, bien-être et expression de soi », observe-t-elle. Textures et senteurs issues de la cosmétique viendront ainsi dialoguer avec les textiles, ouvrant de nouvelles perspectives d’expérimentation.
Quant aux enjeux internationaux, ils restent au cœur des préoccupations du salon. « Nous vivons une crise à la fois conjoncturelle et structurelle. D’un côté, l’instabilité géopolitique oblige à une certaine agilité ; de l’autre, les marques doivent répondre à des exigences croissantes en matière de durabilité et de maîtrise des coûts », résume Florence Rousson. Dans ce contexte, Première Vision entend continuer à jouer son rôle de boussole, en apportant aux professionnels une lecture des marchés et des solutions concrètes. Le salon poursuit par ailleurs son déploiement à l’étranger, avec des éditions en Europe, Amérique du Nord et Asie. « Cela permet aussi de s’adresser à des acheteurs qui voyagent moins qu’avant, ou qui sourcent autrement. »
