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Quels sont les enjeux sociaux et environnementaux de la mode made in Vietnam ?

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Avec ses voisines l’Inde et la Chine, le Vietnam figure parmi les plus gros producteurs de vêtements au monde. Il y a une dizaine d’années encore, l’industrie vietnamienne était fréquemment critiquée pour son incapacité à respecter les droits des travailleur·ses. S’en sont suivis de nombreux travaux de recherche scientifiques, des actions ONG mais aussi des institutions internationales, et des annonces de la part du gouvernement vietnamien. Qu’en est-il aujourd’hui ? La production de vêtements au Vietnam est-elle source d’exploitation humaine ? Comment travaillent les ouvrier·es du textile vietnamiens, où, pour quel salaire ? Que peut-on dire de la qualité des vêtements étiquetés Made in Vietnam ?

Depuis des décennies, le Vietnam est un centre majeur de fabrication pour les leaders de la mode. Les usines du pays fournissent les plus grandes marques internationales, dont Nike, Puma, Gap, H&M ou Zara. Nike seul y compte plus de 100 fournisseurs. Le Vietnam se classait ainsi cinquième plus grand exportateur de vêtements vers l'UE en 2023, juste après la Chine, le Bangladesh, la Turquie et l'Inde, avec une valeur d'exportation de 4,4 milliards d'euros.

Le Vietnam fait du textile un pilier de son développement économique  

Le Vietnam connaît l’ouverture, l’économie de marché et la mondialisation depuis depuis 1986 (et la politique du Đổi Mới). Depuis, la croissance solide de l'économie et des exportations vietnamiennes est en partie attribuable à sa position en tant que hub mondial de fabrication. L’industrie, qui représentait 33 % du PIB du Vietnam en 2016, est le deuxième plus grand secteur industriel après les services. Les vêtements et le textile sont les produits les plus exportés après les biens électroniques. Le secteur fournit environ 2,5 millions d’emplois à travers le pays. En 2017, le Vietnam a exporté 31,16 milliards de dollars américains de vêtements, un volume en augmentation chaque année. En 2022, l’industrie textile et vestimentaire a rapporté 44 milliards de dollars au pays. Le Vietnam, comme les grandes économies d’Asie avant elle, fait de la production textile un support de son développement économique. Si les revenus que le pays tire de ses exportations de mode ont légèrement baissé en 2023, il s'agit toutefois d'une évolution du marché due à une baisse de la consommation dans les pays clients, et non à un rejet du "made in Vietnam" en tant que tel.

Le Vietnam suit-il le même chemin que la Chine avant lui, c'est-à-dire miser sur une production à bas coût, de qualité limitée, mais en très large quantité, parfois au détriment des droits humains, dans l’objectif d’opérer une montée en gamme avec le temps ? Pas si sûr, et pour plusieurs raisons. D’abord, l’exemple chinois montre aux voisins qu’il est difficile de sortir du modèle bas-coût / basse qualité. Même en étant devenue la deuxième économie mondiale, la Chine n’a toujours pas réussi à redorer le blason du Made in China et les fleurons de son industrie vestimentaire sont encore des grandes chaînes d’ultra fast fashion de basse qualité. Ensuite, le contexte international a considérablement changé entre les années 1970 - 1980, quand la Chine a commencé à sérieusement développer son industrie textile, et celui que nous connaissons aujourd’hui en 2024. Si le Vietnam veut s’appuyer sur la production de vêtements pour développer son économie, il lui est obligatoire de s’aligner sur des standards réglementaires internationaux bien plus strictes qu’auparavant.

Au Vietnam, des conditions de travail perfectibles, mais bien meilleures que chez les voisins

Depuis les années 2010, la législation vietnamienne se renforce petit à petit sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants. Le salaire minimum existe au Vietnam. Il est divisé en 4 zones, des plus urbaines aux plus rurales afin de prendre en compte les différences de coût de la vie entre les régions. Le salaire minimum vietnamien est également fréquemment réévalué. Dans les grandes villes (région 1, Hanoi et Hô Chi Minh-Ville) il est passé d’environ 161 dollars américain en 2016, à 192 dollars américains en 2022. Il augmentera de nouveau de 6 %  d’ici juillet 2024 pour atteindre 204 dollars. Dans les zones les plus rurales, il sera d’environ 141 dollars. A chaque évolution, le salaire minimum des zones rurales et les zones urbaines connaissent le même pourcentage d'augmentation.
Marion Lopez est aujourd’hui connue comme la fondatrice de
l’école de mode marseillaise Studio Lausié. Avant de lancer ce projet, elle a coordonné la production de plusieurs marques de mode dont la néerlandaise Daily Paper. C’est dans ce contexte qu’elle a passé du temps dans les usines asiatiques de 2016 à 2020 et qu’elle a pu constater les différences de conditions de travail entre le Vietnam et ses voisins. “Le prix plus élevé de la production au Vietnam est justifié par le fait que la qualité est meilleure, mais aussi par les conditions de travail qui le sont également.” explique-t-elle.

Des ouvriers et ouvrieres déjeunent dans le réfectoire de leur usine au Vietnam.
Pause déjeuner dans une usine vietnamienne à Binh Thuan. Crédits : ILO

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