Depuis l’élection de Donald Trump, perçu comme favorable au secteur des cryptomonnaies, celles-ci ont connu une hausse spectaculaire. À l’heure où cet article est rédigé, le Bitcoin dépasse les 96 000 dollars, après avoir atteint un pic à 107 000 dollars fin 2024. À titre de comparaison, son cours le plus bas date de 2010, où il valait seulement 0,04 centime. Aujourd’hui, l’adoption du Bitcoin par la finance traditionnelle est une réalité, comme en témoignent les ETF basés sur le Bitcoin et l’Ethereum. Le nombre de particulier·es investissant dans les cryptomonnaies ne cesse de croître. L’heure est-elle venue pour les marques et les boutiques de mode de les accepter comme moyen de paiement ?
En France, 12 % de la population détient des cryptomonnaies, contre seulement 7 % qui possèdent des actions. Ces investisseur·ses, plus jeunes que la moyenne, sont également plus familier·es avec les nouvelles technologies et constituent une cible stratégique pour le commerce.
Le Printemps et les paiements en cryptomonnaie
Le Printemps fait partie des pionniers français à permettre le paiement en cryptomonnaie. Le processus est simple :
- Le client, détenteur d’un compte Binance, sélectionne une cryptomonnaie dans son portefeuille.
- Il scanne un QR code fourni par le magasin.
- Il effectue un virement correspondant au montant dû.
Cependant, le magasin reçoit la somme convertie directement en euros, évitant ainsi de conserver des cryptomonnaies et de subir leur volatilité.
Le cas du Salvador
En septembre 2021, le Salvador est devenu le premier pays à adopter le Bitcoin comme monnaie légale, en complément du dollar américain. La loi Bitcoin obligeait les commerçant·es à accepter cette cryptomonnaie pour le règlement des biens et services.
Cependant, en décembre 2024, lors de négociations avec le FMI pour un prêt de 3,5 milliards de dollars, le gouvernement salvadorien est revenu sur cette obligation. Les résultats étaient peu convaincants : seuls 8 % des Salvadorien·nes utilisaient le Bitcoin et à peine 14 % des entreprises avaient réalisé au moins une transaction en Bitcoin.
Pourquoi les paiements en cryptomonnaie restent (encore) une mauvaise idée
Les cryptomonnaies sont avant tout des instruments de trading ou d’épargne à long terme. Elles ne sont pas pensées pour des paiements au quotidien.
Le Bitcoin est perçu comme une réserve de valeur, comparable à l’or, en raison de sa quantité limitée. Les autres cryptomonnaies (Altcoins) reposent sur des projets technologiques et servent principalement à des usages internes (paiements de services ou gouvernance). Pour un·e investisseur·se, dépenser ses cryptomonnaies revient à se priver d’un potentiel de valorisation future.
Un problème de volatilité
La volatilité extrême des cryptomonnaies est un obstacle majeur : leur valeur peut fluctuer considérablement en quelques heures. Exemple avec le Bitcoin : en 2024, sa valeur a progressé de 160 %, mais il a également subi par le passé des baisses drastiques. Accepter un paiement directement en cryptomonnaie ferait courir un risque financier significatif aux commerçant·es.
Le Bitcoin : l’arbre crypto qui cache la forêt blockchain
Toutes les cryptomonnaies reposent sur des blockchains, une technologie révolutionnaire. La blockchain est un système de stockage et de transmission d’informations sécurisé et transparent. Ce registre numérique, organisé en blocs liés de manière chronologique, est infalsifiable. Pour les acteurs du commerce, cette technologie présente des avantages bien plus prometteurs que l’utilisation des cryptomonnaies pour les paiements.
Deux domaines clés bénéficient particulièrement de la blockchain : traçabilité et authenticité
Le cas de LVMH et la lutte contre la contrefaçon
Grâce à un partenariat avec VeChain, des puces RFID intégrées aux produits garantissent leur authenticité tout au long de la chaîne d’approvisionnement.
H&M et la transparence
Cette technologie permet aux consommateurs de vérifier l’origine et la durabilité des produits.
Pour séduire une clientèle jeune et moderniser leur image, certains commerçant·es choisissent d’accepter les paiements en cryptomonnaie. Toutefois, la conversion immédiate en euros reste essentielle pour supprimer les risques liés à la volatilité.
En revanche, la blockchain offre des solutions innovantes pour sécuriser la traçabilité et l’authenticité, des atouts qui pourraient transformer les pratiques commerciales dans les années à venir. Ces innovations, bien que moins médiatisées, auront probablement un impact bien plus significatif que l’acceptation des paiements en cryptomonnaie.
Expert des sujets retail, Sylvain Bronzino est fondateur et CEO de Alternatives Retail Consulting, bureau de conseils auprès des entreprises du luxe et du prêt à porter.