PCR et étude génomique, une révolution scientifique pour tracer le coton ?
Rédigé par Victoire Satto
Le 13 juil. 2022
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En Europe, les marques auront bientôt l’obligation de prouver leurs allégations environnementales, dont la véracité d’une certification bio pour le coton. Aux Etats-Unis, elles doivent désormais démontrer, en cas de contrôle douanier, que le coton employé dans tout ou partie de leurs produits n’est pas issu d’une région de Chine où l’on exploite le peuple Ouïghours [1]. Mais en dehors d’informations déclaratives, comment le certifier ? La médecine légale et les techniques habituellement utilisées par les laboratoires de biologie, comme l’analyse PCR, s’avèrent aussi être utiles et applicables au textile. Nous avons rencontré Eurofins et Oritain lors de l’édition de juillet 2022 de Première Vision, deux entreprises dont les laboratoires proposent ces services.
Ces contenus ont été renseignés par une conférence modérée par The Good Goods lors de l’édition de juillet 2022 de Première Vision Paris.
La transparence est le point de départ, pas une fin en soi.
Comment fonctionne l’analyse génétique des échantillons textiles ?
Si les deux entreprises effectuent des démonstrations différentes, leur méthode est basée en commun sur l’étude du patrimoine génétique d’un échantillon textile, après avoir établi et amplifié celui-ci. Ce patrimoine unique peut-être étudié pour ses propriétés elles-mêmes (celles du coton et de sa provenance géographique) ou pour identifier d’autres composants (par exemple, des pesticides).
Les machines requises et la méthode sont les mêmes que celles employées à large échelle à des fins médicales, légales ou de traçabilité dans l’industrie agro-alimentaire.
Un test PCR pour garantir le caractère biologique d’un coton
La société Eurofins applique un test PCR (Réaction en Chaîne de la Polymérase) à la recherche de plus de 200 pesticides et 250 composants toxiques ou “Hazardous Chemicals« , selon le référentiel GOTS et les normes REACH. Il est également possible de ne tester qu’une liste précise d’éléments.
Ce test est particulièrement bienvenu en contexte de mise en application prochaine de la PEF (Product Environmental Footprint) et de la Stratégie de l’Union Européenne pour des textiles durables en cours de mise en place par la Commission Européenne (EU strategy for sustainable textiles – European Commission) qui prévoit de renforcer la lutte contre le greenwashing et de punir les fausses allégations environnementales en l’absence de preuves tangibles.
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Une amplification génétique pour tracer l’origine géographique d’une matière
La société Oritain peut identifier la source d’un échantillon de coton en analysant son empreinte génétique ou chimique. Cela est rendu possible par l’échantillonnage préalable et la cartographie de l’ensemble des terres agricoles mondiales, y compris celles où l’on cultive le coton. En effet, les sols contiennent des minéraux, des sédiments, très spécifiques selon leur localisation, leur histoire, le climat environnant. Ces éléments sont autant de critères d’identifications ayant modulé le patrimoine génétique au fil des décennies des plantes et des animaux élevés. Ainsi l’outil est applicable également à la laine ou encore au cuir.
Dans le cas du coton, deux applications principales pour une marque ou un fabricant textile :
- La traçabilité prouve une qualité associé à une origine géographique (Égypte, Grèce etc)
- La traçabilité permet de boycotter un coton cultivé dans une région à risque d’exploitation humaine, particulièrement le Xinjiang connu pour l’exploitation des Ouïghours
L’analyse isotopique est une autre méthode qui examine l’empreinte chimique d’une fibre, qui varie en fonction de l’environnement dans lequel le coton a poussé en fonction de facteurs tels que l’altitude, les précipitations et la composition du sol.
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Quel intérêt en comparaison à un autre système de traçabilité ?
- Contrairement aux données inscrites et encryptées dans la blockchain, qui sont purement déclaratives, il s’agit ici de deux méthodes fondées sur la science, non falsifiables et reproductibles à l’infini sur un échantillon minime. Ces deux outils prometteurs sont déployables à grande échelle.
- Les deux peuvent être effectuées à toutes les étapes de la chaîne de production, mais sont plus performantes sur des échantillons de matière brute non transformée.
- Les deux sont applicables à des textiles mélangés (filature ou tissage), mais sont également préférentiellement à effectuer sur les balles de coton. A noter, en cas de mélange de coton bio avec du coton non bio, par exemple recyclé, le test est biaisé et ne présente plus d’intérêt.
- La facturation est effectuée à l’échantillon et encourage ainsi les marques, pour ne pas avoir à les réitérer, à rester fidèles à leurs fournisseurs.
Références
Sur le visuel 1
[7] https://www.businessoffashion.com/briefings/sustainability/get-out-of-chinas-coercive-cotton-fields/
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