Faut-il travailler moins pour sauver la planète ?
Rédigé par Renaud Petit
Le 27 juin 2022
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Nos modes de vie doivent changer en profondeur si nous voulons enrayer le changement climatique, de la façon dont on se déplace à la façon dont on produit et dont on consomme… Mais nous savons aussi qu’il faut engager un réel changement culturel et sociétal, en commençant peut-être par notre rapport au travail. Dans plusieurs pays, dont la France, des études solides appellent désormais à moins travailler. La semaine de 4 jours serait, en fait, une arme puissante contre le changement climatique et la pollution qu’on ne soupçonnait pas !
Moins de travail, moins de déplacements, moins de pollution
“En Angleterre et au Pays de Galles, parmi les 26,5 millions de travailleurs /…/, plus de la moitié vont au travail seuls en voiture (15,3 millions) ou en taxi (1,4 million). Il est clair qu’une réduction du temps de travail à grande échelle aurait un effet positif sur la réduction des émissions de CO2 dues au transport.” explique Laurie Mompelat, autrice d’un rapport sur la semaine de 4 jours pour le think tank britannique Platform. En France, le transport est, en effet, responsable de 31 % de nos émissions de gaz à effet de serre selon l’ADEME [1]. La voiture représente plus de la moitié de ces émissions.
Travailler un jour de moins dans la semaine conduit donc à réduire l’usage de la voiture et à alléger l’empreinte carbone de chacun·e. Le fait n’est pas si étonnant puisque nous l’avons tous et toutes constaté en 2020 pendant le confinement, lorsque la majorité des travailleurs et travailleuses étaient en télétravail ou en chômage partiel. Partout en Europe, alors que la majorité de la population travaillait encore mais que les déplacements étaient réduits au minimum, l’air est rapidement devenu plus propre. Le Haut conseil pour le climat a d’ailleurs chiffré les bienfaits du confinement sur l’environnement. On sait donc désormais que cette année-là, 45 millions de tonnes de CO2 n’ont pas été rejetées dans l’atmosphère, soit environ 10 % de la quantité annuelle de carbone émise habituellement, soulignant l’impact majeur des transports individuels dans cette affaire !
Moins de jours de travail et moins de déplacements en voiture signifient aussi moins de pollutions dangereuses pour la santé. Pendant le confinement toujours, 1 200 décès dus à l’exposition au NO2 ont pu être évités, ainsi que 2 300 décès liés à l’exposition aux particules fines.
Laisser les bureaux vides pour améliorer notre efficacité énergétique
L’hypothèse peut paraître fumeuse, mais elle est pourtant sérieusement établie. D’après une étude de David Rosnick et Mark Weisbrot, deux chercheurs du Center for Economic and Policy Research [2], nous dépensons plus d’électricité lorsque nous sommes au travail que lorsque nous sommes chez nous. Les ordinateurs, les machines que nous utilisons dans le cadre de nos activités professionnelles et qui sont allumés pendant toute la journée de travail consomment beaucoup d’énergie. Si nous restions chez nous un jour par semaine au lieu d’être au travail, nous nous consacrerions vraisemblablement à des activités moins énergivores : promenade en extérieur, lecture, jardin, cuisine, jeu avec les enfants… On pourrait tout aussi bien utiliser notre ordinateur ou jouer aux jeux vidéo, mais sans laisser la lumière allumée, contrairement au bureau… « Les travailleu·rs·ses qui ont moins de temps à dédier aux loisirs utiliseront plus facilement un sèche-linge au lieu de faire sécher leurs vêtements sur un étendage. Iels auront également moins de temps pour la marche à pied ou le vélo et préféreront la voiture pour se rendre au travail. Ces changements de comportements induits par des horaires de travail étendus font que l’efficacité énergétique de chacun·e décroît à mesure que le temps de travail augmente” peut-on lire dans leurs travaux.
Attention toutefois, si les études semblent pour l’instant aller dans ce sens, il n’est pas impossible que la situation dérive. Le think tank Platform met en garde : “Si les gens utilisent leurs week-ends de trois jours pour partir en week-end en avion ou en voitures sur de longues distances, pour faire du shopping, ou même pour regarder la télévision, ce qui consomme beaucoup d’énergie, en laissant la climatisation allumée toute la journée, le week-end de trois jours pourrait finalement devenir néfaste pour l’environnement. »
Et au final, moins d’heure pour chacun·e, c’est peut être un job pour tout le monde !
L’intérêt n’est pas qu’écologique, il est aussi social. Si tous les salarié·e·s réduisaient leurs horaires et travaillaient moins, il est possible que le besoin en main d’œuvre augmente et qu’un accroissement du personnel soit nécessaire dans certaines entreprises.
Travailler moins pour travailler tou·s·tes et vivre mieux sur une planète plus saine. Qu’est ce qu’on attend ?
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