Présidentielle 2022 : les projets des candidat·e·s en matière d’écologie
Rédigé par Renaud Petit
Le 09 avr. 2022
Minutesde lecture
Selon le troisième volet du rapport du GIEC paru ce lundi 4 avril 2022, nous avons 3 ans pour agir et stabiliser la courbe du dérèglement climatique. En France, il faudra donc compter sur le prochain président ou la prochaine présidente pour faire quelque chose. La politique écologique de chaque candidat·e devrait donc être au cœur de nos intentions de vote. Pour essayer d’y voir plus clair, nous avons résumé les propositions de chacun et de chacune, en se basant sur 3 des plus grands enjeux présents dans le dernier volet du rapport du GIEC.
1 : Selon le GIEC, il faut d’urgence abandonner les énergies fossiles et carbonées
Nathalie Arthaud, candidate Lutte Ouvrière, ne s’exprime pas beaucoup ni clairement sur ce sujet. On sait toutefois qu’elle n’est pas hostile au nucléaire, ni aux autres sources d’énergie renouvelable.
Philippe Poutou, candidat du Nouveau Parti Anticapitaliste, est clairement opposé au nucléaire et souhaite fermer toutes les centrales d’ici 10 ans pour les remplacer par 100 % d’énergies renouvelables, sans précision sur le mix énergétique visé.
Jean-Luc Mélenchon, candidat de l’Union Populaire menée par la France Insoumise, est globalement anti-nucléaire. Il souhaite mettre fin aux investissements français dans les énergies fossiles, y compris à l’étranger. D’ici 2050, il vise un mix énergétique 100 % renouvelable en doublant le parc éolien (avec 18 500 éoliennes) tout en misant aussi sur le photovoltaïque. Les réacteurs nucléaires de plus de 50 ans devront fermer.
Fabien Roussel, candidat du Parti Communiste Français, à l’opposé, mise sur le nucléaire et signale vouloir investir en ouvrant 6 nouveaux EPR pour se passer des énergies fossiles.
Yannick Jadot, candidat d’Europe Ecologie les Verts, mise sur les énergies renouvelables. Il prévoit de créer 3 000 éoliennes terrestres et 340 km2 de photovoltaïque d’ici 2027. Il souhaite aussi développer le biogaz. Les réacteurs nucléaires seront fermés petit à petit.
Anne Hidalgo, candidate du Parti Socialiste, se rapproche du candidat EELV, sans deadline précise.
Emmanuel Macron, candidat La République en Marche, continue sur sa lignée et vise l’ouverture de 6 nouvelles centrales nucléaires au cours du prochain mandat. Il souhaite aussi multiplier le parc photovoltaïque par 10 et développer l’éolien en mer d’ici 2050.
Valérie Pécresse, candidate Les Républicains, compte mettre fin aux énergies fossiles en s’appuyant sur le nucléaire avec la création de 6 nouveaux EPR et la prolongation de la durée de vie des réacteurs existants. Elles annoncent aussi vouloir développer le biogaz, les biocarburants et l’hydrogène d’ici 2050.
Jean Lassalle, candidat du parti de droite Résistons!, ne donne pas de chiffres précis ni de deadline mais annonce vouloir développer à la fois le nucléaire, l’énergie solaire et les énergies marémotrices.
Nicolas Dupont-Aignan du parti Debout la France veut dédier 1 milliard d’euros au développement de l’énergie nucléaire. Il souhaite mettre fin immédiatement au développement de l’éolien et de l’énergie solaire.
Eric Zemmour, candidat du parti d’extrême droite Reconquête, promet lui aussi d’augmenter la production d’énergie nucléaire en créant des dizaines de nouveaux EPR. Il souhaite aussi mettre fin au développement de l’éolien et de l’énergie solaire, et envisage de développer une filière hydrogène.
Marine le Pen, candidate d’extrême droite du Rassemblement National, est pro-nucléaire (comme les autres candidat·es de droite). Elle veut créer 6 nouveaux EPR, stopper l’éolien et le solaire, et veut développer l’hydrogène sans projet chiffré.
Pour plus de précisions sur les projets de décarbonation, il est possible de lire les lettres adressées par chaque candidat·e au Think Tank français The Shift Project. Seuls Emmanuel Macron et Jean Lassalle n’ont pas souhaité participer.
2 : Le GIEC appelle à rendre l’industrie plus sobre et offrir des modes de consommation plus durables
Jean-Luc Mélenchon a un programme fourni en la matière. Le candidat souhaite lutter contre l’obsolescence programmée et allongeant les délais de garantie des produits, interdire les plastiques à usage unique, rendre obligatoire la consigne des bouteilles en verre et renforcer le tri en rendant obligatoire le tri des biodéchets (pour créer des fertilisants ou de l’énergie) d’ici 2025. Autre point important, Jean-Luc Mélenchon compte généraliser les mentions explicites de qualités environnementales et de durabilité des produits, affichées sur les produits de consommation courante. Le candidat n’a, à notre connaissance, pas précisé toutefois si cette mesure concernait aussi la mode et la beauté.
Fabien Roussel n’est pas très loquace sur ce sujet. Il compte toutefois bien associer les entreprises à la transition en les contraignant à abonder au budget du fond écologique et social qu’il souhaite créer.
Yannick Jadot ne s’attaque pas de manière très précise à l’industrie et la consommation durables. Son projet comporte surtout de grands souhaits généraux, surtout en matière d’agriculture et d’alimentation : diviser l’utilisation d’engrais de synthèse par 2 et stopper l’utilisation de pesticides, interdire le glyphosate, les néonicotinoïdes et d’autres pesticides dangereux, limiter les quantités de poissons pêchés, lutter contre la présence de substances toxiques dans les biens de consommation courante et Interdire l’exploitation minière des fonds marins dans la ZEE de la France.
Anne Hidalgo semble baser son projet sur des concepts plus que sur des mesures précises. Elle évoque, par exemple, une économie de la réparation qu’elle appelle de ses vœux face à une économie de la consommation. Le souhait n’est pas totalement creux puisqu’elle annonce tout de même vouloir créer une filière de réemploi et de réparation des produits électroniques qui bénéficierait d’une réduction de TVA. Côté agriculture et alimentation, elle vise l’interdiction du glyphosate et des néonicotinoïdes, une augmentation du bio et un resserrage par l’Etat des conditions de pêches pour les rendre plus durables.
Emmanuel Macron a une mesure phare qui se rapproche d’une de celles de Jean-Luc Mélenchon : le candidat souhaite mettre en place une information claire sur les qualités environnementales des produits, visibles par les consommateurs dès l’achat. A la différence du candidat LFI, Emmanuel Macron précise bien que ce score environnemental concernerait notamment la mode et la beauté. Au-delà, son programme n’est pas très fourni en ce qui concerne la durabilité des modes de production et de consommation.
Valérie Pécresse mise sur deux mesures : la fin du plastique à usage unique plutôt évidente et peu ambitieuse, mais aussi le rejet d’une agriculture sans pesticide ou engrais, ce qui est plutôt original dans le contexte de crise que nous traversons.
Jean Lassalle n’a pas de programme à proprement parler sur la question de la production durable. Il a toutefois un projet pour la consommation puisqu’il souhaite mettre en place un système de “ticket” permettant aux consommateurs et consommatrices de favoriser des produits en circuit courts.
Nicolas Dupont-Aignan souhaite aussi favoriser l’alimentation en circuit court en la rendant plus présente dans les menus des cantines scolaires. Comme d’autres, il appelle à mettre fin à l’obsolescence programmée en mettant en place une réponse pénale contre les entreprises coupables. Côté agriculture, il fustige les normes environnementales qui, selon lui, rendent les produits français trop peu compétitifs sur les marchés internationaux. Il souhaite néanmoins aider financièrement les agriculteurs et agricultrices qui souhaitent passer au bio.
Eric Zemmour mise sur le renforcement des filières de recyclage pour tenter de rendre notre consommation plus responsable. Au-delà, nous n’avons pas trouvé beaucoup de projets concernant la production et la consommation responsables.
Marine le Pen propose aussi un soutien financier aux agriculteurs et agricultrices bio. Dans son programme comme dans celui d’Eric Zemmour, nous n’avons malheureusement pas trouvé grand chose d’autre.
3 : Par-dessus tout, le GIEC appelle les États à investir massivement pour l’environnement
En la matière, les propositions sont variées et extrêmement inégales. Certains candidats et candidates proposent des projets chiffrés et précis quand d’autres restent vagues, voire quasi silencieux·ses.
Jean-Luc Mélenchon est, pour le moment, celui qui propose de mettre le plus d’argent sur la table : 200 milliards d’euros dédiés uniquement à l’écologie, pour financer de grands projets “sociaux et utiles” à travers tout le pays.
Le candidat annonce également vouloir financer la rénovation de 700 000 logements pour réduire drastiquement le gaspillage énergétique.
Fabien Roussel reste, lui, plus vague. Le candidat signale toutefois vouloir mettre en place un fond social et écologique dont le budget financé par l’Etat et les entreprises serait équivalent à 6 % du PIB (aujourd’hui, cela signifierait un budget de 140 milliards d’euros).
Yannick Jadot dispose évidemment d’un programme très fourni en matière d’écologie mais peu d’investissements concrets. Il propose pour le moment de créer un fond d’1 milliard d’euros chaque année pour combattre les crises liées au dérèglement climatique.
Anne Hidalgo a également du mal à chiffrer ses projets. Toutefois, plusieurs de ces objectifs signalent implicitement des investissements massifs de l’Etat. La candidate annonce vouloir accompagner les citoyen·nes et les entreprises dans la fin des énergies fossiles, et mettre en place un plan de décarbonation de l’économie sur 5 ans, une nouvelle prime rénovation pour 760 000 logements par an (donc vraisemblement un quoi qu’il en coûte écologique). Plus que des investissements, la candidate propose un désinvestissement de l’Etat : plus aucune subvention publique n’ira aux activités jugées néfastes pour l’environnement. La maire de Paris prévoit aussi de créer un impôt de solidarité sur la fortune climatique pour financer la transition en prenant l’argent là où il est.
Emmanuel Macron ne brille pas par son bilan en matière d’écologie. Investira-t-il plus de moyens dans un éventuel second mandat ? Le candidat n’avance pas de chiffre précis. Il signale toutefois vouloir mettre en place une taxe carbone aux frontières, sans dire si l’argent récolté sera réinjecté dans des projets pour lutter contre la crise climatique.
Valérie Pécresse propose aussi une taxe carbone aux frontières, sans préciser si l’argent récolté sera réinjecté dans des projets pour lutter contre la crise climatique. En matière d’investissement, son programme est un peu plus précis que celui d’Emmanuel Macron. La candidate annonce vouloir financer un grand projet de désimperméabilisation des sols à 200 millions d’euros. Elle signale aussi vouloir électrifier les transports et rénover les lignes de trains, ce qui implique des investissements importants qui ne sont pour l’instant pas chiffrés.
Jean Lassalle ne donne aucune indication chiffrée quant au budget qu’il veut allouer à la lutte contre la crise.
Nicolas Dupont-Aignan propose d’investir 3 milliards d’euros en plus pour la rénovation énergétique des bâtiments, sous la forme de subvention Ma Prime Renov. Il souhaite aussi, sans chiffrer son projet, mettre à disposition des aides destinées à aider les citoyen·nes à changer de voiture individuelle.
Eric Zemmour ne chiffre pas non plus d’investissements précis. Il évoque l’isolation des bâtiments et parle de dépolluer les sols, sans dire combien il compte faire dépenser à l’Etat.
Marine le Pen ne parle pas d’investissements généraux pour lutter contre la crise. Elle signale uniquement vouloir mettre fin aux investissements de l’Etat dans les énergies solaires et éoliennes.
Espace commentaire
(0)