Slow-conso, redonner du sens aux fêtes de Noël
Rédigé par Victoire Satto
Le 14 sept. 2020
Minutesde lecture
Un mois qu’elle figure sur la to-do-list des articles à publier, on n’arrive pas à m’y mettre. Des idées pour Noël, c’est ce qu’on nous a demandé. Des jolis objets de marques #goodgoods, enrubannés dans du tissu ou du craft recyclé. Des produits sortis en édition limitée, des pop ups qui éclosent un peu partout, à Paris comme ailleurs. On a promis, on ne peux pourtant pas m’y résoudre. Tout ce qu’on couche sur le papier sonne faux et déplacé.
Pourquoi on déplore ce que sont devenues les fêtes de Noël
Miromesnil. Le métro parisien n’a jamais autant senti la pisse, sous l’amoncellement des sans domiciles fixes déposés là comme des perce-neiges par la vague de froid.
Opéra, à quelques pas, les portes béantes d’un Mango débitent le chauffage qu’il leur faudrait, à même la rue de la Paix.
Cette super planète part en cette-su / Mais le diable continue de me rappeler qu’y a jamais assez de sucre.
Lomepal ft. 2Fingz- Lucy
Comprendre ce qui sonne faux dans cette course aux cadeaux de Noël
Quand avons-nous été pour la dernière fois les acteurs de nos choix ? Quand avons-nous fermé la porte à l’injonction d’achat, omniprésente entre les soldes et les fashion weeks, asséné·es d’offres similaires qui remplissent nos maisons d’objets à l’utilité précaire ?
Tout l’enjeu de notre ère est d’arriver à produire moins et mieux en s’épanouissant
Arrête les blagues t’es mignon / Même toi tu feras tout pour avoir des milliards si un jour tu gagnes des millions.
Lomepal ft. 2Fingz – Lucy
Crédits @TheFutureLaboratory
Aux actes citoyenn·es
Tout le monde souhaiterait un monde meilleur / Mais au final, qu’en-est-il ?
Lomepal x 2Fingz – Lucy
Alors finalement, quelle signification voulons nous donner aux fêtes de Noël ?
C’est l’image qu’il en reste dans nos mémoires d’enfants.
Ça n’est pas une fête commerciale, ça n’est pas la réunion contrainte ou la menace d’une famille en conflit qui multiplie les diversions pour repas qui s’éternisent. C’est une merveilleuse opportunité de se reconnecter à soi et aux autres. C’est un moment que l’on prépare ensemble, dont on se réjouit, où l’on peut faire la démonstration vraie de ce qu’est l’amour littéral : l’acceptation de l’autre tel qu’il est, pour rien. Et le remercier d’exister pour ça.
Écrire des cartes de voeux à la main.
Faire des centaines de kilomètres pour les bras de nos grand-parents qui cochent les jours sur le calendrier des pompiers depuis la fin des grandes vacances.
Cuisiner ce qu’on aura échangé comme recettes des jours durant avant cette réunion, en questionnant ce qui fait sens, nos retranchements, nos chapelles, en ouvrant nos esprits sur la possibilité de faire différemment cette fois, une part pour la planète, en remplaçant la dinde pantagruélique par un met végétarien. En saluant le travail du producteur voisin plutôt que des amuse-bouches surgelés, colorés mais si tristes.
Jouer ensemble à des jeux de plateaux jusqu’à trois heures du mat’ au coin du feu.
Proposer un cadeau expérience, pour mieux prolonger la douceur de ces instants entre proches. Un théâtre, une expo, un ciné, un cours d’œnologie ou de permaculture, un escape game, un week-end pour construire une cabane.
S’engager à donner un peu de son temps précieux à une association, le faire avec quelqu’un de cher à qui on donnera l’occasion de provoquer les rendez-vous.
Laisser s’échapper la vulnérabilité des coeurs, prendre le temps de s’ouvrir à ce qui pose question, quand les certitudes établies vacillent, discuter des heures de ce qui compte dans nos courtes existences et qui ne se résume pas aux mensualités de nos prêts ou aux 2 pour le prix d’1 du Black Friday.
Partager ses derniers coups de cœurs et de cerveaux, ce qui nous meut. Un livre, un podcast, un film.
Imaginer les défis à relever, ensemble encore, parce qu’apparemment #onestprêt à agir dans l’individualité connectée plus que nos politiques dans leur gouvernance déphasée de la réalité (5) : trier sa boite mail, faire un défi végé, se passer d’avion pour une année, redécouvrir la lenteur et la proximité, débarrasser caves et greniers de tout ce qui nous encombre et ce dont notre accumulation maladive nous empêche de nous séparer, quand l’Autre au coin de la rue en aurait justement l’utilité.
La liste est infinie, à vous de la poursuivre. À l’heure où ceci paraît il est de toute façon trop tard pour lister les pop ups de Noël.
Allons, humains, faire de ce siècle celui des liens, des expériences et des sensations vraies plutôt que des goodies bariolés au pied d’un baril de pétrole déguisé en sapin.
On souhaite un merveilleux Noël à tous.
Let’s define ourselves, not by what we own but through our experiences and relationships.
Green Peace
(1) Samuel Hayat – Les gilets jaunes l’économie morale et le pouvoir
(2) La Relève et la Peste
(3) Thomas Friedman, un Pulitzer dans le cloud – France Culture
(4) The Economics of Hapiness and Psychology of Wealth – Research Gate
(5) Discours de Greta Thunberg à la COP 24
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