10 objets en plastique du quotidien constituent les 3/4 des déchets océaniques
Rédigé par Victoire Satto
Le 20 févr. 2022
Minutesde lecture
Une récente étude publiée dans la prestigieuse revue scientifique Nature fait état des principaux déchets plastiques retrouvés dans les océans. Les sacs à usage unique, les bouteilles, les contenants et les emballages alimentaires sont les quatre articles les plus répandus qui polluent les mers. En tout, 10 objets représentent les 3/4 des déchets plastiques retrouvés et sont – sans surprise – des objets de notre consommation quotidienne.
Ce qui se passe dans la mer est un symptôme du problème – l’origine du problème et donc la solution sont sur terre, c’est là que nous devons agir.
Les déchets plastiques les plus répandus sont le reflet de nos mauvaises habitudes quotidiennes
Repas et boissons à emporter. Nous sommes la génération Uber Eats, celle d’une pandémie qui a propulsé la livraison à domicile et le take-away au rang de norme au quotidien. Un coffee-to-go dans un contenant jetable chaque matin, des poubelles de tri inexistantes ou bien dont l’usage qu’on en fait est indifférencié. La pollution massive qui en résulte, nous ne la côtoyons pas au quotidien. Le drame, c’est que le cerveau humain ne sait pas réagir aux dangers qu’il ne voit pas. De la même manière qu’on s’indigne devant les photos du Rana Plaza et qu’on est incapable de faire le lien devant un blazer chez Zara. Nous faisons de cette routine une certaine idée du confort moderne, sans réaliser que la pollution des milieux océaniques revient à polluer notre maison commune et que la résultante s’annonce tout sauf confortable.

Quels objets en plastique polluent nos océans ?
L’équipe espagnole de Carmen Morales-Caselles publie ce mois de juin 2021 une étude dans la prestigieuse revue scientifique Nature. Elle porte sur l’analyse du type de déchets retrouvés dans les milieux marins, en surface, et à divers degrés de profondeur, classés par fréquence et composition. Il s’agit de l’étude la plus exhaustive et sérieuse à ce jour.
L’analyse portait sur des éléments de plus de 3 cm et identifiables, à l’exclusion des fragments et des microplastiques. Elle distinguait les articles en plastique à emporter et les contenants de produits de toilette et de produits ménagers. L’étude portait sur 12 millions de points de données issues de 36 bases de données à travers le monde.
Les principaux résultats :
- 10 objets en plastique représentent 75% de tous ceux retrouvés, il s’agit en majorité de contenants et couvercles pour des plats et des boissons à emporter ;
- Les plus présents : des bouteilles d’eau, des canettes de Coca Cola et des gobelets Mcdonald’s ;
- Les pailles et les touillettes représentent 2,3 % du total des déchets analysés, les cotons-tiges et les bâtons de sucette 0,16 %, également une grande proportion d’objets de pêche ;
- Ces résultats s’appliquent dans le monde entier.
La plus forte concentration de déchets a été trouvée sur les rivages et les fonds marins près des côtes. Les scientifiques déclarent que le vent et les vagues balayaient cycliquement les déchets vers les côtes, où ils s’accumulent dans les fonds marins. Le matériel de pêche, comme les cordes et les filets, était davantage présent au large dans les océans, où il représente environ la moitié des déchets.
Une autre étude – sur laquelle s’est appuyée l’équipe de Carmen Morales-Caselles – portait sur les déchets océaniques issus de 42 rivières européennes. Elle montre que la Turquie, l’Italie et le Royaume-Uni sont les trois principaux contributeurs aux déchets marins flottants. En mai, Greenpeace dénonçait l’hypocrisie de Boris Johnson quant à sa politique de gestion des déchets plastiques, supposés être envoyés en Turquie pour recyclage, en réalité brûlés ou jetés à la dérive vers les océans. Les citoyens américains et britanniques produisent plus de déchets plastiques par personne que tout autre grand pays, selon d’autres recherches récentes.
Limiter la production de déchets à sa source
Les scientifiques le déclarent : ces constats ne doivent pas seulement nous pousser à nettoyer et recycler au maximum ces déchets, mais nous sommes urgemment d’agir à leur source. Le lobby du plastique a étouffé les résolutions gouvernementales et les mesures coercitives concernant les pailles et les coton-tiges, supposées être interdites et s’étendre à tous les dispositifs jetables pour la nourriture et les boissons à emporter dès janvier 2021. La pandémie est une nouvelle excuse au tout jetable (masques, couverts, blouses, gants) sous couvert de sécurité sanitaire. Pourtant les masques en tissus ont été prouvé autant efficaces et lavables plus de 60 fois en machine. Jetés au bon endroit dans une poubelle textile, ils sont revalorisés et s’inscrivent dans une économie circulaire, finissant très rarement dans une poubelle. Au-delà de l’éducation citoyenne, ce sont les producteurs de plastiques et les metteurs en marché qu’il faut contraindre à se responsabiliser.
Fermer le robinet des déchets marins est plus simple que de les nettoyer.

Les chercheurs recommandent l’interdiction stricte des articles en plastique à emporter évitables, tels que les sacs à usage unique, comme étant la meilleure option, en association à l’optimisation des systèmes de collectes et au développement massif de la consigne.
Nous ne recyclerons jamais la quantité de déchets plastiques que nous produisons actuellement.
Référence
An inshore–offshore sorting system revealed from global classification of ocean litter ; Carmen Morales-Caselles & Al Nature Sustainability 4, 484–493 (2021)

Espace commentaire
(0)