L’impact environnemental de nos vêtements s’affichera bientôt sur les étiquettes
Rédigé par Renaud Petit
Le 18 déc. 2020
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En 2020, celles et ceux qui souhaitent en savoir plus sur l’impact environnemental d’un vêtement ou d’une marque n’ont pas d’autre choix que de passer par la case “recherches”. En plus d’être chronophage, cette situation pose naturellement un problème d’inégalité entre les consommateurs et consommatrices. Les informations ne sont pas toujours accessibles et pas forcément lisibles pour l’ensemble de la population. En France, la filière mode et les acteurs de la transition écologique travaillent donc à mettre en place un système simple permettant à chacun·e d’évaluer en un coup d’œil l’impact environnemental de chaque vêtement. Le dispositif devrait être officialisé bientôt et nous savons d’ores et déjà quelle forme cette information prendra sur les étiquettes de nos vêtements.
Une proposition très attendue
Dans le sillage du Grenelle de l’environnement de 2009, le ministère chargé de la transition écologique et solidaire réunissait l’Ademe (l’Agence de la transition écologique) et 70 entreprises de la mode en février 2020. Objectif : entamer un débat autour de la nécessité de construire un système d’évaluation des performances environnementales pour l’industrie textile. L’importance de permettre aux consommateurs et aux consommatrices d’identifier rapidement les vêtements les plus responsables apparaît alors comme une évidence.
Suite à cette rencontre, le ministère lance un travail de 18 mois avec les acteurs de la filière mode et l’Ademe à compter de février 2020. Dès lors, le groupe est chargé de définir les formes que ce système de notation pourrait prendre, puis de le tester jusqu’à l’été 2021.
Un système simple et ultra-lisible sur la base du Nutri-Score
En décembre 2020, le projet se situe donc environ à mi-parcours. Un système a d’ores et déjà été défini et est entré en phase de test grâce à la participation d’un certain nombre de marques.
Sur le modèle du Nutri-Score, l’affichage environnemental des vêtements suit, pour l’instant, un système de notation de A à E (“A” correspondant à la note la plus haute et “E” la note la plus basse).

- l’impact des matières utilisées pour la fabrication du vêtement, l’emploi de ressources renouvelables et durables ;
- l’utilisation de matières toxiques pour l’environnement, notamment celles utilisées pour traiter les tissus ;
- l’impact du procédé industriel de fabrication en matière d’énergie, de pollution des sols, de l’air et de l’eau ;
- l’impact carbone du transport du vêtement et des matériaux qui ont servi à sa conception ;
- les éventuelles pollutions engendrées par l’entretien du vêtement, notamment les microfibres de plastiques rejetées dans les eaux usées ;
- la possibilité, ou non, de recycler, réparer ou même composter le vêtement en fin de vie.
Chaque évaluation sera validée par l’Ademe. Toutefois, elles devront d’abord être calculées par les marques elles-mêmes. La diversité et la complexité des critères d’évaluation soulèvent alors des interrogations quant à la capacité des marques de se doter de structures capables de calculer ces notes produit par produit.
Un dispositif facultatif qui devrait être mis en œuvre très prochainement
Un bilan de ces expérimentations devrait être dressé en août 2021 afin de permettre au texte d’intégrer la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire. Cette loi dépasse le strict cadre de la mode et comprend notamment l’interdiction pour les entreprises de détruire les produits invendus, la fin de certains plastiques à usage unique ou encore la présence obligatoire de filtres à microfibres sur tous les lave-linges neufs.
Contrairement au Nutri-Score, il n’est cependant pas prévu que l’affichage environnemental soit obligatoire. Le ministère se contente, pour l’instant, d’évoquer une application sur la base du volontariat. Les informations affichées seront tout de même surveillées et toute fausse information serait, à priori, passible de 15 000 € d’amende pour une entreprise et 3 000 € d’amende pour une personne physique. L’absence d’obligation pour les marques ne signifie toutefois pas que la mesure est nécessairement inutile.
La phase de test actuellement en cours devrait permettre de vérifier si l’étiquetage environnemental permet aux marques d’augmenter les ventes des produits les mieux notés. Si tel est bien le cas, ce constat pourrait tout à fait inciter les entreprises à étiqueter de manière visible leurs produits les mieux notés dans l’objectif de booster leurs ventes. A terme, elles devraient également être amenées à favoriser des productions plus vertueuses si celles-ci se révèlent plus performantes d’un point de vue commercial.
Toutefois, la formule n’a évidemment pas que des avantages. On peut assez facilement imaginer qu’il sera plus intéressant pour une marque d’étiqueter un produit noté “A” qu’un produit noté “E”. Ainsi, on peut craindre que l’outil soit principalement utilisé par les marques pour signaler leurs produits les mieux conçus. S’il ne devient pas obligatoire, l’étiquetage environnemental pourrait ne devenir qu’un énième moyen pour les consommateurs et les consommatrices de repérer les produits éco-conçus, à défaut de leur permettre de repérer plus simplement et d’éviter les produits les plus polluants. Cette démarche est déjà proposée par de nombreux labels et certifications indépendants qui ont, parfois, l’avantage d’offrir des informations bien plus précises et ciblées que celles mises à disposition par l’étiquetage environnemental prévu par le gouvernement.
L’importance de ce travail est d’autant plus grande que le système d’affichage environnemental des produits de mode dessinés en France pourrait être amené à traverser les frontières. Pour l’instant, l’Union européenne n’impose pas ni ne prévoit d’imposer une telle mesure. Toutefois, un cycle de réflexion pour un plan d’action en faveur d’une économie circulaire est lancé à l’échelle européenne et devrait s’achever sur des propositions concrètes d’ici 2023. Le sujet de l’affichage environnemental pourrait émerger dans le cadre de ces discussions et pourrait notamment s’appuyer sur les travaux réalisés en France.
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