Portrait de jeune créateur : Grégoire Willerval, designer et fondateur de streewear Éclort
Rédigé par Victoire Satto
Le 17 juil. 2021
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Designer de couleurs. De motifs. D’imprimés à messages qui se fondent dans l’époque et bousculent les codent traditionnels des écoles de Mode. Créer son enseigne avant d’être diplômé, il faut oser. Maîtriser la chaîne de production, du dessin aux finitions des bord-côtes, c’est ambitieux et déterminé, surtout quand on a 24 ans. Vainqueur du Prix Avantex du Festival de Dinan où The Good Goods était jury, il a défilé deux fois pour cet évènement, les Marie Claire Fashion Days à Budapest, concourut pour plusieurs festivals dont l’Open Mode et Dress Code. Rencontre avec le fondateur de la marque Éclort qui grandit en fleurissant la street.
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Grégoire perçu par The Good Goods (et pourquoi on l’adore)
Grégoire est un jeune créateur au talent franc et au sens aigu du détail. Ses collections sont audacieuses, libres de codes et affranchies des jugements. Ses confections valorisent le Made In France et le savoir-faire. Si son jeune âge n’est pas dénué d’expérience, c’est parce qu’il fait preuve d’écoute et de curiosité pour enrichir perpétuellement ses idées et sa méthode de travail. Échange de bons procédés créatifs, le rap et la street le nourrissent, alors il rend à la street et au rap. En collaborant avec des rappeurs, en créant des vêtements qui s’expriment, en incitant son prochain à vivre son Style, indépendamment du regard de l’autre.
L’interview de Grégoire Willerval
Qui es-tu Grégoire ?
Pourquoi as-tu choisis la mode ?
Comment est née ta marque, Éclort ?
Comment procèdes-tu pour créer une collection ?
Comment est-ce que tu te réinventes en tant que créateur ?
La catchphrase « extend boundaries« , c’est s’inspirer du quotidien et le rendre mode en changeant de dimensions. Utiliser un foulard sur un homme, masquer son visage pour mettre en avant mon print et le vêtement avant le mannequin. Casser le culte du spectacle, du selfie, de l’égo et le port conventionnel d’un accessoire détourné pour se protéger du regard de l’autre. Cacher et attirer l’attention en même temps, dans une société où on est filmés en permanence. Je détourne également mes méthodes de travail. Pour l’instant je ne vis pas de ma marque, je suis modéliste ou styliste pour des concepts stores, des bureaux de tendance, mais aussi des rappeurs. On a créé une ligne de vêtements avec Alpha Wann – son album Une main lave l’autre, est selon moi la meilleure prod de rap de l’année ! – qui n’y connaît rien en vêtements, c’est un extra-terrestre de la Mode et c’est précisément ce qui m’intéresse. Il ne réfléchit pas en terme de collections, séries, coûts. Il prend le temps pour l’objet, avec méticulosité, la coupe, les matières, il n’hésite pas à renvoyer des commandes si la qualité du tissu n’est pas suffisante. Il est plus consciencieux que des professionnels du milieu ! C’est agréable d’être dans le respect de l’essence créative bien plus que dans la rentabilité.
Où sont confectionnés tes vêtements et accessoires ?
Je ne suis pas excellent en anglais et j’avais besoin de maîtriser : des usines proches, rencontrer les travailleurs, discuter concret. Dans un premier temps, le parti pris du Made In France l’était par facilité. Puis j’ai compris l’importance de la valorisation du savoir-faire avec le temps, perpétuer une histoire. Jusqu’à il y a peu, je faisais tout de A à Z : dessiner, patronner et coudre. Je suis un touche-à-tout hyper curieux, j’ai une machine pour tricoter mes propres bord-côtes, et je fais l’ensemble de mes visuels. Les textiles sont maintenant parfois importés d’Espagne, notamment pour les collabs où les commandes concernent de gros volumes, et parce que j’y ai trouvé une entreprise qui fait des jersey et des sergés exceptionnels, des matières techniques imperméables de grande qualité. Je veux que l’on reste une production Made In Europe contrôlée, et Made In France pour les accessoires. Les imprimés eux sont réalisés à Bobigny.

Je préfère être un voyou donneur qu’un citoyen spectateur.
Cette citation figure sur toutes mes étiquettes, elle vient d’un graffeur.
Quel est ton rapport aux tendances ?
J’ai un grand frère de 5 ans de plus, les vêtements n’étaient pas un pôle de dépense important pour mes parents : je portais ceux qu’il avait peu mis. Au collège et au lycée, j’avais toujours des looks qui avaient 5 ans de retard, ce qui est le pire cycle… 10 ans plus tard les tendances peuvent revenir, 5 ans tu es pile dans tout ce qu’il y a de plus has been. J’étais souvent raillé, aujourd’hui j’en prends probablement la revanche. J’ai gardé cette habitude de porter un peu n’importe quoi et ne pas réfléchir à la dernière it-piece, car c’est pour moi normal d’être regardé, on sourit à mon passage dans la rue, ça ne me dérange pas. Je mixe le matin, pour le plaisir et sans penser à ce qui ce fait en terme de mélanges de motifs, de matières ou de nuances.

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