
Que Savez-Vous Réellement De L'Upcycling ?
Comment génère-t-on proprement des vêtements considérés neufs à partir de déchets textiles ? Est-ce réellement portable et si oui, est-ce une solution viable pour l'industie du vêtement ?
L’upcycling signifie littéralement « recycler par le haut ». Il s’agit de valoriser en les reconditionnant des textiles et vêtements existants en de nouvelles pièces dont la valeur est supérieure. Cet article explique l’upcycling à une échelle professionnelle : comment une marque d’upcyling génère des vêtements considérés neufs à partir de déchets textiles ? mais peut s’appliquer également à une échelle personnelle (réparer un jean troué avec un empiècement en patch ou fabriquer une éponge tawashi à partir d’un vieux T-shirt) que nous n'aborderons pas ici.
C’est Martin Margiela qui, en 1989, s’était intéressé à la transformation des matières, à la fois pour dénoncer la société consumériste du tout jetable (à l’époque, elle ne concernait pas autant les vêtements, il avait fait défiler des tops en sacs plastiques Franprix) et pour démontrer le potentiel esthétique des objets qui nous entourent, devenus œuvres de Haute Couture par simple détournement.
Crédits @EthanBodnar
Re-produire de la matière textile
L'upcycling se démocratise aujourd’hui dans la mode. Il concerne à la fois ce que l’on appelle les récupérables de l’industrie : tissus (invendus ou non utilisés par des maisons de mode), chutes textiles, rideau, linge de maison, mais également des vêtements. Ces derniers peuvent être neufs ou usagés, issus de dons de particuliers ou de filières de tri. Il sont lavés, contrôlés pour connaitre leur état d’usure et trois options s’offrent alors : les revendre ou les donner via des circuits de seconde main/des œuvres caritatives, les recycler s'ils sont trop abîmés, les déstructurer afin de servir de base de travail à des designers upcyclers spécialisés. On défait les coutures, on retire les boutons et les fermetures éclaires, on classe les matières et les couleurs et on obtient un vivier de matières finies qui constitue une ressource textile immense pour une marque d’upcycling.
(RÉ)ÉCOUTER L'ÉPISODE DU SAPPING SUR LE TRI AVEC ADÈLE RINCK @LAFIBREDUTRI
La créativité naît de la contrainte
Contrairement à ce qu’on peut penser, l’upcycling est une contrainte pour le designer. Il lui est impossible d’anticiper la quantité, la couleur et la nature du textile avec lequel il va pouvoir composer. Ainsi, il ne peut penser ni au patron ni même au type de vêtement qu’il va concevoir. Entre un crop top et un trench, il y a quelques variables à ajuster. À contrario, il n’a pas à choisir deux ans à l’avance le ton de ses prochaines collections ou gérer/brûler/enterrer un stock en surproduction, ce qui ne va pas sans enlever une certaine pression…
C’est à la fois un gain de temps - les ressources sont immédiatement disponibles - et une perte car le design n’est pas anticipable. C’est enfin un avantage économique, qui se répercute chez le consommateur.
Crédits @VOLHAFAXECO
Un vêtement durable et unique
Côté consommateur, c’est un total win.
- Pour le style : l’upcycling est la garantie d’avoir un vêtement unique au monde, original et porteur d’histoire;
- Pour l’environnement : reconditionner une matière existante, c’est faire une double épargne énergétique : celle de l’exploitation d’une ressource naturelle pour fabriquer un textile (coton ou pétrole) et celle de la destruction d’un produit fini ou semi-fini inutilisé;
- Pour la qualité : cette vérité n’est pas générale, mais bien souvent les vêtements ou tissus reconditionnés sont anciens, ils ont résisté au temps, au stockage, à la lumière et aux lavages. Il sont plus volontiers conçus à partir de fibres naturelles, et tissés pour être robustes, protéger, et perdurer dans le temps (= le principe d’un vêtement avant la fast-fashion). Par ailleurs, pour être retravaillés, ils doivent être de qualité afin de ne pas boulocher, s’effilocher, bailler en étirant les mailles... On vous le donne en mille : on ne fera pas grand chose d’un top à 3.99€ en Lycra;
- Pour la santé : on ne connaît encore les effets secondaires des pesticides contenus par les fibres naturelles ou les composants chimiques qui donnent leurs propriétés aux matières. Trois choses sont factuelles : on porte nos vêtements à même la peau, quasi 100% du temps + la peau est le plus grand des organes + plus un vêtement est lavé, moins il contient de substances potentiellement toxiques. On vous laisse calculer l’intérêt de porter de la seconde main ou du reconditionné (jusqu’à ce qu’on change nos manières de produire);
- Pour le portefeuille : le coût du textile étant moindre, si la marque joue le jeu et ne pratique pas de marges aberrantes, cela se ressent sur le prix ! Une nuance : les upcyclers sont souvent des personnes concernées par l’écologie et la justice sociale. Les manufactures sont souvent françaises ou localisées dans des pays aisés, dont la main d’œuvre justement rémunérée est également plus chère. Pour vous donner une idée, il s’agit de milieux de gammes compris entre 50 et 200€.
Crédits @CORALIEMARABELLE
Un remède écologique
Usage de stocks dormants, réemploi de matières, valorisation d'un travail fini... Faut-il vraiment vous faire un topo pour cet argument ?
L'upcycling, c'est propre, c'est mode, c'est bon pour la santé et l'environnement. Selon nous, ça n'est ni une tendance ni un épiphénomène mais cela doit devenir une méthode de production vestimentiaire normée, enseignée au même titre qu'un autre savoir-faire dans les écoles de mode.
Pour conclure en image, voilà six marques d’upcycling qu’on aime. De nombreuses émergent, faites-nous part de vos découvertes & vos expériences d'achat dans les commentaires !
LA SÉLECTION THEGOODGOODS
GAËLLE CONSTANTINI
Éco-conception en France, perpétuation du savoir-faire français, formation continue des personnels en Île-de-France, dans des ateliers d’insertion. Éco-gestion de l’atelier de création (recyclage des déchets et des textiles inusités) - Slow création (été/hiver).
CORALIE MARABELLE
Prix du public du Festival de Hyères en 2014 - Slow création - Prêt-à-porter très haut de gamme en en série limitée. Production française principalement parisienne.
SUPERMARCHÉ
(RÉ)ÉCOUTER L'ÉPISODE DU SAPPING SUR SUPERMARCHÉ AVEC MONIA SBOUAÏ
Lignes confortables, pratiques et de qualité. Pièces assemblées dans des ateliers de couture qui permettent l’insertion professionnelle à Paris et à Saint-Denis.